Gérard Poujade. Maire du Séquestre. Vice-Président ESS et circuits courts Com. Agglomération Albi
Petit à petit ce sont 4 grandes surfaces alimentaires de l'albigeois qui ont pris l'habitude d'ouvrir le dimanche matin. Jusqu'où ce mouvement va-t-il s'étendre ?
Je comprends que nombre de (petits) commerces, de commerces de proximité nécessitent une ouverture le dimanche, que ceux-ci font typiquement partie du lien social dominical. En revanche, je ne vois pas très bien l'intérêt d'ouvrir de grandes surfaces alimentaires. Je ne suis pas persuadé que les achats du dimanche viennent en sus du chiffre d'affaires de la semaine, les consommateurs n'ont pas un pouvoir d'achat extensible et l'on ne reprend pas deux fois ce qui est acheté ce jour là plus qu'un autre.
Poussons le raisonnement un peu plus loin : et si tout le monde travaillait le dimanche !? A la fin des fins qui serait là pour consommer ? Les mêmes que tous les jours de la semaine ! Le travail "généralisé" du dimanche, c'est tout à la fois une régression sociale et une régression sociétale ! Un salarié qui travaille le dimanche matin, c'est un bénévole de moins dans une association. C'est le défaut d'encadrement d'un enfant qui se retrouve seul pour finir ses devoirs. C'est aussi un lieu de discorde entre personnes humbles : ceux qui seraient vaillants et qui, après s'être levés tôt, se lèvent le dimanche, et ceux, les autres, fainéants invétérés, qui ne se lèveraient pas et ne travailleraient donc pas le dimanche matin.
C'est encore une fois, une stigmatisation de "l'autre", du nuisible, de celui qui profite, que l'on retrouve devant cette idée saugrenue de vouloir faire travailler encore et encore, de plus en plus de monde le dimanche. D'autant plus que la France qui travaille le dimanche existe déjà et cela concerne beaucoup de professions, beaucoup de salariés. Il y a tout le petit commerce, composé de chefs d'entreprises fort éloignés du CAC 40, il y a le secteur médical et paramédical, la restauration, le tourisme, une bonne partie du monde agricole, les personnels de secours...
Le travail du dimanche est souvent présenté comme une manière de gagner plus pour les salariés. Je ne le nie pas, cela permet de mieux être rétribué, même si les évolutions des règles du travail permettent de rémunérer de moins en moins les personnels du dimanche et jours fériés. Mais cela n'a de sens que si le choix est libre pour le salarié. Hors, nous savons que dans une négociation entre employeur et employé le rapport de force est toujours en faveur du premier.
Il faut dénoncer la généralisation du travail du dimanche. Elle fonctionne comme une boule de neige : au fur et à mesure que d'autres commerces ouvrent, ils entraînent ceux qui souhaitaient résister au mouvement et imposent ici du travail à des salariés qui ne demandaient rien.